On commence par des sauts.
Petits, rythmés, répétés, éreintant jusqu’à l’étouffement.
Puis on lève les genoux à chaque enjambée, haut devant soit. Les bras suivent, les poignets montent au dessus de la poitrine, et le mouvement entraîne tout le corps en tension vers le haut. Encore, encore et encore, jusqu’à ce que la sueur gicle à chaque mouvement.
En largeur, maintenant : Les jambes sont gardées tendues, et s’écartent en rythme. Quel rythme ? Celui, léger, fait par ses pieds en touchant le sol, un clapotement sec et presque vitreux qui s’accélère. Les bras s’écartent en cœur, les épaules s’ouvrent dans un grognement de douleur.
Puis vient le moment de mettre genoux à terre. Une fois, doucement, mais sans laisser aucun répit, puisqu’il faut à nouveau se relever, et souplement se baisser sur la jambe opposée. Deux fois, trois fois, six fois, cent fois, jusqu’à ce que les os grincent et tirent, jusqu’à ce que les membres ne soient plus que la peau tendue d’une fronde chargée à bloc.
Il est temps de tirer sur la corde. Mains jointes, tendues vers le ciel, puis frappant un genoux levé pour l’occasion ; un fracas en cadence, alternant droite et gauche. Imaginer la tête de Death, ici, entre ses mains et son genoux encore violet; écrasée en une bouillie infâme…
Puis se baisser, s’asseoir dans le vide pour gracieusement esquiver un ennemi imaginaire; pour ensuite remonter pied en avant, ramenant son genoux jusqu’à son coude brandi en avant ; et encore tout reprendre jusqu’à ce que le mouvement ne soit qu’une pensée, qu’un réflexe.
Toucher le ciel; Sauter, au plus haut, imaginer caresser du doigt ce plafond de métal fendu de noir… Et se laisser chuter. La réception se fait sur ses bras contractés et la pointe de ses pieds, droite et raide comme une planche, pour se projeter à la force de ses avant bras, et, ramassée en boule de muscles en fusion, sauter de nouveau-
Quand les jambes lâchent, cassantes et fébriles sous l’abus, vient le temps de s’allonger.
Pour se reposer ? Quelle idée. Pas de repos pour les âmes damnées !
Et, trois fois prisonnière, Naran était triplement damnée.
Non, plutôt que de s’abandonner à l’épuisement, il faut raidir bras et jambes, et les joindre tendu devant son corps allongé. Lever le bassin, maintenir le contrôle sur ses membres fourbus, et aller et venir au dessus d’un abdomen plus bandé que l’arc d’une Hun en chasse.
Quand les bras lâchent, quand il est impossible de les maintenir au dessus de soi, il faut les projeter sur les côté, et, se reposant uniquement sur ses omoplate et son fessier, éclater en une étoile de muscles contracté.
Tenir, tenir, tenir, compter les coups reçus et les coups encore à rendre, mordre ses propres dents comme un chien enragé, puis se ramasser en une boule fulminante, en équilibre sur ses fesses toujours tendue, empoignant ses jambes encore trop faibles.
Si le sang qui goutte d’entre ses gencives n’est que le résultat d’une morsure de la lèvre, reprendre à zéro.
Si, au contraire, le goût amer vient du fond de ses entrailles… Il est temps de s’attaquer aux assouplissements.