La ville du Domaine Enchanté, tranquille et calme comme à son habitude. Le château du roi Stéphane, splendide avec ses pierres blanches, imposant avec ses tours immenses, dominait cette ville, apportant un sentiment de sécurité à ceux qui levaient les yeux vers lui. Pas un nuage dans ce ciel si bleu qui annonçait une excellente journée à tous. Puis soudain, une ombre voila le soleil l’espace d’un instant, plongeant les habitations dans l’ombre, changeant la couleur du château en un gris déprimant. Une immense bête ailée survolant les environs. La ville était dévorée par les flammes. Les tours du château s’écroulèrent, écrasant les maisons qui ne pouvaient soutenir leur poids. Les rues se remplirent de sang, créant un véritable fleuve. Et celui-ci prit feu, donnant l’impression que les enfers se déchaînaient sur terre. Et à travers la fumée, riant à plein poumon, un être ailé et squelettique, plus petit que la bête, regardait le spectacle. Il trancha de son immense faux la fumée, et ses yeux brillèrent l’espace d’un instant. La mort était arrivée en ville.
Je me réveillai sur cette dernière image, les cheveux en batailles, le dos couvert de sueur, la respiration haletante. Il me fallut quelques minutes avant de retrouver mes esprits, avant de réussir à me convaincre que ce n’était qu’un rêve, ou plutôt un cauchemar, et que j’allais parfaitement bien. Enfin, parfaitement était peut-être exagéré. J’allais bien. Lorsque je fus sûr d’être de nouveau maître de mon esprit et de mon corps, je balançai mes jambes hors du lit à baldaquin et me levai. J’enlevai le pyjama que m’avait apporté le haut prêtre d’hier, et je m’habillai avec mes vêtements, les seuls que j’avais, et qu’une aimable servante avait lavé pour moi hier. J’étais heureux de voir que le sang, et l’odeur de cadavre les avaient quitté.
Je sortis de la chambre qui m’avait été attribué à mon grand regret. Je n’étais encore connu que de peu de personnes ici. Le Sanctum ne pensait pas encore que j’étais leur primate, ou primarque, enfin leur sauveur élu. Et cette situation m’allait parfaitement dans un premier temps. Si j’avais sauté sur l’occasion que le vieux sénile m’offrait, je ne me voyais pas berner les foules ad vitam aeternam sans autres informations que celles apportées durant ma discussion avec Cassandra, ou lues grâce à l’éclaireur. Mais qui pouvais-je interroger discrètement pour les avoir ? Pour une fois, je séchais complètement devant une question qui se posait à moi.
Tout en marchant dans les couloirs, admirant les tableaux, les tapisseries, les armures ou les tapis qui les décoraient, je réfléchissais à cette enigme. J’avais la possibilité de demander directement à Cassandra qui m’avait semblé réticente à accepter ma nouvelle situation. Je pouvais également questionner Marvin si je m’y prenais correctement, avec subtilité. Mais c’était risqué. Si je faisais le moindre faux pas, je m’exposais à perdre la chance qui m’était offerte de changer le fonctionnement de nos mondes. Alors que j’énumérais mes possibilités, je vis au bout du couloir un vieil homme qui tomba à terre, laissant échapper de nombreux ustensiles et fioles qui, fort heureusement, ne se brisèrent pas. Je ramassais ce qui se trouvait près de moi, puis j’aidai mon prochain à se relever.
-Vous allez bien monsieur ?
-Oui, oui merci jeune homme. Il se frotta le dos en grimaçant. Je me suis encore pris les pieds dans ces maudits tapis.
-Ce sont des choses qui arrivent. Un moment d’égarement, et la chute arrive vite, répondis-je en souriant. J’ai moi-même failli chuté en sortant de ma chambre. Où alliez-vous ?
-À mon laboratoire.
-Puis vous accompagner dans ce cas ? Et peut-être vous tenir compagnie. Je ne sais pas quoi faire de mon temps libre actuellement.
-Si vous voulez. Et je vous trouverai bien une occupation si vous n’avez vraiment rien à faire.
Ensemble, nous reprîmes notre marche, bien que dans mon cas, je rebroussais surtout chemin. J’avais de la chance de tomber sur le médecin du château. Les rares que j’avais rencontré étaient discrets et promptes à aider autrui. Et si je n’étais pas une personne en quête d’aide, qu’étais-je ? J’avais vraiment besoin d’informations pour survivre dans ce nouvel environnement. Et puis je pourrai me renseigner sur la situation de Cassandra au passage. S’il consentait à m’en parler du moins.
Lorsque nous arrivâmes à destination, je le laissai entrer le premier et je refermai la porte derrière moi. Le vieil homme qui m’avait dit s’appeler Stephen ouvrit une fenêtre et alluma un bec bunsen. Il revint ensuite à mes côtés, et me donna un pilon, une tasse et des feuilles à broyer. Je me mis aussitôt au travail, observant du coin de l’œil ce qu’il faisait. J’imaginais que c’était un médicament, de quelque sorte que ce soit. Cependant, je n’écartais pas qu’il puisse s’agir d’autre chose infiniment plus dangereux.
-Depuis combien de temps êtes-vous au château ?
-Oh, depuis bien des années. Je travaillais déjà ici quand le Sanctum s’est installé parmi nous.
-Vous devez en connaître des choses alors.
-En médecine oui. Sur les gens que je soigne aussi. Mais pour la religion, je suis loin d’être un prêtre. Pourquoi cette question Matthew ?
-Et bien… J’avais un choix à faire, ici et maintenant. Je suis arrivé hier au Domaine, et alors que je discutais avec une templière du nom de Pentaghast, un prêtre m’a dit que j’étais le primarque. Je fis une pause, lui laissant le temps d’assimiler que j’étais l’élu de son culte. J’ai joué le jeu, j’ai accepté ce qu’il disait parce que ça m’arrangeait. Mais je ne suis pas le primarque. Je suis juste un homme qui vient de débarquer du fin fond de son petit monde. Et j’aurai aimé que vous m’en disiez plus sur cette se… religion. Ça m’aiderait à m’adapter plus facilement.
L’homme ne répondit pas. Comme il m’avait tourné le dos pour travailler, je ne pouvais voir son expression. Était-ce de la surprise, de la colère, ou du désespoir qui se peignait sur son visage ? Je n’aurais su le dire, même si ma vie en dépendait. Le silence continua encore pendant de longues minutes, faisant peser sur mes épaules un poids réel. Avais-je commis une erreur en me livrant autant ? Si facilement ? Non. Non ce n’était pas une erreur. Je devais le croire.
-Matthew… Je ne suis pas un prêtre. Que vous soyez le primarque ou non, je ne peux que me fier à leur dire. Il se tourna vers moi. Ils voient plus de choses que le commun des mortels. Il se tut quelques instants. Votre secret sera le mien, mais je ne peux malheureusement pas vous aider comme vous le souhaiteriez.
-Oh… Et bien tant pis, souriais-je de dépit. Vous êtes médecin Stephen. Peut-être pourriez-vous me dire de quoi souffre Cassandra ? Et comment ça lui est arrivé.
-J’ai bien peur que non. Tout ce que je peux vous dire, c’est qu’elle a reçu une très mauvaise blessure. Et qu’elle ne se soigne pas comme il le faudrait, rajouta-t-il avec une pointe de colère dans la voix. Les guerriers sont tous les mêmes.
-Que faudrait-il pour qu’elle aille mieux ?
-Du repos. Beaucoup de repos. Mais elle a la bougeote. Et puis il faudrait qu’elle accepte de prendre du lait de pavot, continua-t-il en montrant de la main une étagère où se trouvait un liquide blanc sale. Mais elle refuse strictement et je ne peux pas la forcer à en prendre.
-Je vois. J’essaierai de la convaincre de changer d’avis. Elle m’écoutera peut-être.
-J’espère mon garçon. J’espère.
Je continuais encore quelques minutes à broyer les feuilles qu’il me donnait. Puis j’allai déposer les instruments et les ingrédients près de lui, prétextant qu’un prêtre voulait me voir dans la matinée. Au passage, et tant qu’il avait le dos tourné, je subtilisai un flacon de lait et quittai la pièce. Ça pourrait toujours servir à l’avenir. Et si Cassie refusait son traitement, je pouvais peut-être lui administrer d’une autre manière.
Je me réveillai sur cette dernière image, les cheveux en batailles, le dos couvert de sueur, la respiration haletante. Il me fallut quelques minutes avant de retrouver mes esprits, avant de réussir à me convaincre que ce n’était qu’un rêve, ou plutôt un cauchemar, et que j’allais parfaitement bien. Enfin, parfaitement était peut-être exagéré. J’allais bien. Lorsque je fus sûr d’être de nouveau maître de mon esprit et de mon corps, je balançai mes jambes hors du lit à baldaquin et me levai. J’enlevai le pyjama que m’avait apporté le haut prêtre d’hier, et je m’habillai avec mes vêtements, les seuls que j’avais, et qu’une aimable servante avait lavé pour moi hier. J’étais heureux de voir que le sang, et l’odeur de cadavre les avaient quitté.
Je sortis de la chambre qui m’avait été attribué à mon grand regret. Je n’étais encore connu que de peu de personnes ici. Le Sanctum ne pensait pas encore que j’étais leur primate, ou primarque, enfin leur sauveur élu. Et cette situation m’allait parfaitement dans un premier temps. Si j’avais sauté sur l’occasion que le vieux sénile m’offrait, je ne me voyais pas berner les foules ad vitam aeternam sans autres informations que celles apportées durant ma discussion avec Cassandra, ou lues grâce à l’éclaireur. Mais qui pouvais-je interroger discrètement pour les avoir ? Pour une fois, je séchais complètement devant une question qui se posait à moi.
Tout en marchant dans les couloirs, admirant les tableaux, les tapisseries, les armures ou les tapis qui les décoraient, je réfléchissais à cette enigme. J’avais la possibilité de demander directement à Cassandra qui m’avait semblé réticente à accepter ma nouvelle situation. Je pouvais également questionner Marvin si je m’y prenais correctement, avec subtilité. Mais c’était risqué. Si je faisais le moindre faux pas, je m’exposais à perdre la chance qui m’était offerte de changer le fonctionnement de nos mondes. Alors que j’énumérais mes possibilités, je vis au bout du couloir un vieil homme qui tomba à terre, laissant échapper de nombreux ustensiles et fioles qui, fort heureusement, ne se brisèrent pas. Je ramassais ce qui se trouvait près de moi, puis j’aidai mon prochain à se relever.
-Vous allez bien monsieur ?
-Oui, oui merci jeune homme. Il se frotta le dos en grimaçant. Je me suis encore pris les pieds dans ces maudits tapis.
-Ce sont des choses qui arrivent. Un moment d’égarement, et la chute arrive vite, répondis-je en souriant. J’ai moi-même failli chuté en sortant de ma chambre. Où alliez-vous ?
-À mon laboratoire.
-Puis vous accompagner dans ce cas ? Et peut-être vous tenir compagnie. Je ne sais pas quoi faire de mon temps libre actuellement.
-Si vous voulez. Et je vous trouverai bien une occupation si vous n’avez vraiment rien à faire.
Ensemble, nous reprîmes notre marche, bien que dans mon cas, je rebroussais surtout chemin. J’avais de la chance de tomber sur le médecin du château. Les rares que j’avais rencontré étaient discrets et promptes à aider autrui. Et si je n’étais pas une personne en quête d’aide, qu’étais-je ? J’avais vraiment besoin d’informations pour survivre dans ce nouvel environnement. Et puis je pourrai me renseigner sur la situation de Cassandra au passage. S’il consentait à m’en parler du moins.
Lorsque nous arrivâmes à destination, je le laissai entrer le premier et je refermai la porte derrière moi. Le vieil homme qui m’avait dit s’appeler Stephen ouvrit une fenêtre et alluma un bec bunsen. Il revint ensuite à mes côtés, et me donna un pilon, une tasse et des feuilles à broyer. Je me mis aussitôt au travail, observant du coin de l’œil ce qu’il faisait. J’imaginais que c’était un médicament, de quelque sorte que ce soit. Cependant, je n’écartais pas qu’il puisse s’agir d’autre chose infiniment plus dangereux.
-Depuis combien de temps êtes-vous au château ?
-Oh, depuis bien des années. Je travaillais déjà ici quand le Sanctum s’est installé parmi nous.
-Vous devez en connaître des choses alors.
-En médecine oui. Sur les gens que je soigne aussi. Mais pour la religion, je suis loin d’être un prêtre. Pourquoi cette question Matthew ?
-Et bien… J’avais un choix à faire, ici et maintenant. Je suis arrivé hier au Domaine, et alors que je discutais avec une templière du nom de Pentaghast, un prêtre m’a dit que j’étais le primarque. Je fis une pause, lui laissant le temps d’assimiler que j’étais l’élu de son culte. J’ai joué le jeu, j’ai accepté ce qu’il disait parce que ça m’arrangeait. Mais je ne suis pas le primarque. Je suis juste un homme qui vient de débarquer du fin fond de son petit monde. Et j’aurai aimé que vous m’en disiez plus sur cette se… religion. Ça m’aiderait à m’adapter plus facilement.
L’homme ne répondit pas. Comme il m’avait tourné le dos pour travailler, je ne pouvais voir son expression. Était-ce de la surprise, de la colère, ou du désespoir qui se peignait sur son visage ? Je n’aurais su le dire, même si ma vie en dépendait. Le silence continua encore pendant de longues minutes, faisant peser sur mes épaules un poids réel. Avais-je commis une erreur en me livrant autant ? Si facilement ? Non. Non ce n’était pas une erreur. Je devais le croire.
-Matthew… Je ne suis pas un prêtre. Que vous soyez le primarque ou non, je ne peux que me fier à leur dire. Il se tourna vers moi. Ils voient plus de choses que le commun des mortels. Il se tut quelques instants. Votre secret sera le mien, mais je ne peux malheureusement pas vous aider comme vous le souhaiteriez.
-Oh… Et bien tant pis, souriais-je de dépit. Vous êtes médecin Stephen. Peut-être pourriez-vous me dire de quoi souffre Cassandra ? Et comment ça lui est arrivé.
-J’ai bien peur que non. Tout ce que je peux vous dire, c’est qu’elle a reçu une très mauvaise blessure. Et qu’elle ne se soigne pas comme il le faudrait, rajouta-t-il avec une pointe de colère dans la voix. Les guerriers sont tous les mêmes.
-Que faudrait-il pour qu’elle aille mieux ?
-Du repos. Beaucoup de repos. Mais elle a la bougeote. Et puis il faudrait qu’elle accepte de prendre du lait de pavot, continua-t-il en montrant de la main une étagère où se trouvait un liquide blanc sale. Mais elle refuse strictement et je ne peux pas la forcer à en prendre.
-Je vois. J’essaierai de la convaincre de changer d’avis. Elle m’écoutera peut-être.
-J’espère mon garçon. J’espère.
Je continuais encore quelques minutes à broyer les feuilles qu’il me donnait. Puis j’allai déposer les instruments et les ingrédients près de lui, prétextant qu’un prêtre voulait me voir dans la matinée. Au passage, et tant qu’il avait le dos tourné, je subtilisai un flacon de lait et quittai la pièce. Ça pourrait toujours servir à l’avenir. Et si Cassie refusait son traitement, je pouvais peut-être lui administrer d’une autre manière.