« Le Président attend des explications. » annonça le garde en uniforme, l'air sévère. Le soldat me poussa l'épaule pour m'inciter à avancer. Les mains liées dans le dos, une arme collée entre mes omoplates, je m'exécutais en silence. Le vaisseau-mère de la Shinra, forteresse imprenable et surprotégée. Des militaires patrouillaient dans chaque couloir, des caméras de surveillance épiaient chacun des mouvements de ceux qui foulaient le sol du quartier général. Rien n'échappait aux yeux de la Shinra, ici. Et Rufus Shinra était comme le roi de ce bastion, intouchable. À la Cité des Rêves, je m'étais rendue à la station de la Shinra et m'étais immiscée dans l'esprit d'un militaire peu gradé, lui donnant la certitude que j'étais une prisonnière de la Compagnie. Je ne pouvais le contrôler indéfiniment, j'avais donc élaboré une stratégie... qui avait toutes les chances d'échouer. D'esprit en esprit, je passais ma garde au soldat suivant, contrôlant leurs pensées jusqu'à ce que ce ne soit plus nécessaire. A bord de la plateforme qui servait de carrefour aux vaisseaux de la Shinra, mon rôle de prisonnière devint réalité, et je me retrouvais aux fers pour de bon. Les cellules de détention étant à bord du vaisseau-mère, deux mercenaires de la Shinra se chargèrent de m'escorter vers celui-ci. Une fois sur place, le Président en fût informé et, n'ayant - évidemment - pas donné cet ordre, exigea de s'entretenir avec mes geôliers et leur prisonnière. Arriver jusqu'au carrefour n'avait pas été très difficile, je maîtrisais de mieux mon pouvoir de persuasion... Mais maintenir ma concentration aussi longtemps sur autant de personnes d'affilée m'avait épuisée. Je craignais d'être incapable de manipuler mes nouveaux gardes si le besoin s'en faisait sentir, et l'idée de finir dans une cellule du quartier général de la Shinra ne m'enchantait guère... Mais il était bien trop tard pour avoir des remords, j'étais face aux portes du bureau du Président encadrée par deux hommes bien bâtis... Je me mordais les lèvres un instant, songeant qu'encore une fois, j'avais vraiment agit sans réfléchir. Lorsque j'avais décidé de m'en prendre à Rufus Shinra en personne, j'étais aveuglée par la colère. J'avais rendu justice à ma sœur en éliminant chacun de ses meurtriers. Mas le Président, c'était une autre histoire. Je le faisais pour moi. Il était responsable de sa mort autant que ses sbires, si ce n'est plus. Il restait là, dans son bureau, je l'imaginais fumant des cigares, buvant un horrible bourbon comme celui qu'aimait mon père. Seul au sommet de sa tour d'ivoire, il passait un coup de fil, donnait un ordre, et décidait de la mort de quelqu'un sans même daigner observer son visage, faire le sale travail. Cela me révulsait, me rendait tellement furieuse, je ne songeais qu'à lui donner ce qu'il méritait... Ma sœur était vengée, mais qui me rendrait ce qu'on m'avait pris ? Qui pourrait réparer le préjudice qui m'avait été causé, à moi ? Il était responsable, c'était de sa faute, et je comptais bien lui faire regretter ses actes. L'un des soldats frappa à la porte et, sur un mot du Président, l'ouvrit. Je plantais immédiatement mon regard dans le sien. Je refusais de baisser les yeux. Quoi qu'il advienne, quelles que soient les conséquences, je ne fléchirais jamais devant un homme tel que lui. Il avait les cheveux courts d'un blond fauve, un visage ovale et le nez aquilin. Son regard aussi dur que l'acier était d'un bleu glacial. Je retenais un frémissement... Cet homme, aussi détestable soit-il à mes yeux, respirait le pouvoir. Je le voyais bien à son costume blanc bien coupé. Propre sur lui, aucun détail de son apparence n'était laissée au hasard. Il se mouvait posément, comme si le temps lui appartenait. Je serrais mes poings gantés de cuir, provocant un très léger grincement. Je portais encore ma combi-short bustier, ma veste et mes collants sombres et, alors que je songeais au contraste entre la blancheur immaculée de sa tenue et le noir obscur de la mienne, un rictus amer se dessina sur mon visage fermé. J'étais la reine noire, et je comptais bien faire échec au roi blanc, quoi qu'il en coûte. |